Le mois de juin a été marqué par deux événements importants en matière de santé sexuelle, auxquels le CFFB a participé, via le CECIF et son AG au Maroc, le 25 juin, et les 30 juin et 1er juillet au congrès organisé par Médecins du Monde (MdM), « Santé et droits sexuels et reproductifs : regards croisés Maghreb-Europe ».
C’est au nom de la plateforme Abortion Right dont le CFFB est membre, que Lucie Barridez, sa coordinatrice également vice-présidente du CFFB, a participé à ce congrès qui a mis en évidence les menaces qui pèsent aujourd’hui sur le droit à l’avortement et les formes émergentes de violences reproductives, notamment en Belgique, en Europe et au Maghreb.
Des menaces communes, des résistances partagées
Dans un dialogue transrégional entre actrices d’Europe et du Maghreb, les échanges au Congrès de MdM ont permis de déconstruire les oppositions souvent faites entre sociétés dites « libérales » et « conservatrices ». En réalité, des dynamiques similaires traversent nos sociétés : montée des mouvements réactionnaires, fragilisation des services publics de santé, attaques contre les droits des femmes, et polarisation autour des questions de genre, d’IVG et de sexualité. Même des pays pionniers comme la Tunisie, qui a légalisé l’avortement dès 1973, voient aujourd’hui leurs acquis menacés. Cependant, la montée des mouvements conservateurs, les coupes budgétaires dans les services publics de santé, ainsi que la polarisation autour de l’IVG, du genre et des droits des femmes, fragilisent les acquis historiques. Par ailleurs, le rétrécissement de l’espace civique complique davantage le travail des associations féministes, des professionnel·le·s de santé et des défenseur·se·s des droits humains.
Dans ce contexte de reculs, cet événement visait à ouvrir un espace de dialogue transrégional entre le Maghreb et l’Europe, pour réfléchir ensemble aux défis actuels, aux formes de résistance, mais aussi aux pistes d’engagement et d’action transnationale en matière de santé sexuelle et reproductive.
Dans le même ordre d’idée, Sylvie Lausberg secrétaire générale du CECIF également présidente de la commission éthique du CFFB, a également attiré l’attention sur les conséquences visibles de la montée de l’extrême droite en Europe sur les acquis et les droits des femmes à la santé sexuelle. Les pays représentés à l’AG du CECIF, en présence de la présidente du Conseil International des Femmes, ont été sensibilisées à une forme de violence qu’une campagne du CFFB a mis en lumière : la coercition reproductive : sabotage contraceptif (détérioration de pilules, retrait non consenti du préservatif – appelé stealthing), pressions pour tomber enceinte ou pour avorter, ou encore contrôle du corps et de la fertilité par des proches, des partenaires, ou même par des politiques publiques restrictives. Ces stratégies – interpersonnelles ou structurelles – visant à empêcher une personne de faire des choix libres et informés en matière de contraception, de grossesse ou d’avortement ont de graves conséquences désormais documentées (troubles psychologiques, douleurs chroniques, infections, grossesses non désirées, isolement, voire tentatives de suicide). Cependant, la coercition reproductive n’est toujours pas reconnue comme une forme spécifique de violence de genre dans les textes européens, en ce compris dans la Convention d’Istanbul et la directive européenne de mai 2024 sur les violences faites aux femmes.
Nos revendications visent donc à la reconnaissance explicite de la coercition reproductive comme violence fondée sur le genre dans le droit européen, à la formation des professionnel·le·s de santé pour identifier et accompagner les victimes, au financement de recherches dédiées, à une éducation précoce à l’égalité, au consentement et aux droits reproductifs, ainsi qu’à un accès sécurisé et transfrontalier à l’IVG, sans entraves politiques ni idéologiques.
« My Voice, My Choice » : un mouvement européen pour le droit à l’avortement
C’est aussi dans cette optique que le CFFB, au sein de la plateforme Abortion Righ, a pleinement soutenu pleinement l’Initiative Citoyenne Européenne « My Voice, My Choice », portée par l’Institut du 8 mars et plus d’une centaine d’organisations dans toute l’Europe. Cette initiative, qui a dépassé le million de signatures validées, demande à la Commission européenne de créer un mécanisme de solidarité : un fonds européen permettant aux États membres volontaires d’accueillir les femmes qui ne peuvent avorter dans leur propre pays. Le CECIF a mis l’accent sur le succès de cette mobilisation – avec des taux de participation impressionnants en Roumanie, Croatie ou même à Malte, pays membre du CECIF et présent à l’AG, mais où l’avortement reste dans les faits, totalement interdit !
Cette initiative européenne démontre une chose : la population européenne est prête à aller de l’avant, et cette volonté transcende les frontières, les idéologies et les clivages politiques.
En conclusion, par ses actions et sa présence le CFFB poursuit tant au plan national qu’international son combat historique pour le droit des femmes à l’autonomie de décision en matière de santé reproductive et sexuelle. Reconnaître la coercition reproductive comme une violence spécifique, défendre un accès effectif à l’IVG, et renforcer les alliances entre sociétés civiles sont des priorités urgentes. Car le droit de décider de son corps, de son futur et de sa maternité n’est pas un privilège, c’est un droit humain fondamental !
