Ta force est une chance pour la paix !
Depuis le 6 mars 2010, les associations membres de la Marche Mondiale des Femmes/Belgique dont le Conseil des Femmes Francophones de Belgique, ont organisé et participé à plusieurs actions tant nationales qu’internationales autour de 4 champs d’actions choisis par la MMF, à savoir : l’autonomie économique des femmes, le bien commun et l’accès aux ressources et aux services publics, les violences envers les femmes, la paix et la démilitarisation.
Le 10 octobre 2010, le Musée royal d’Afrique centrale à Tervuren (symbole de l’histoire commune entre la Belgique et du Congo), a fêté la fin de la troisième édition de la Marche pour la Belgique.
Avant le départ de sa délégation pour Bukavu, le lieu fut choisi pour la clôture internationale de la Marche. A cette occasion, un rappel retentissant des revendications autour de ces 4 champs d’actions a été adressé au public, mais surtout aux autorités belges, européennes et à toute la communauté internationale.
De ces quatre champs d’actions, les violences sexuelles à l’encontre des femmes, la paix et la démilitarisation étaient des points d’une importance primordiale. En effet, personne n’ignore que depuis 1996, l’Est de la République Démocratique du Congo est le théâtre d’exactions les plus graves contre les droits humains (viols, femmes enterrées vivantes, incestes et cannibalisme forcés, tueries, assassinats, villages incendiés, champs ravagés, pillages…) causant des milliers de victimes.
En 2000, l’action de la Marche mondiale des femmes a été l’une des initiatives qui a poussé le Conseil de Sécurité des Nations Unies à adopter la Résolution 1325. Dans celle-ci, sont reconnus l’impact de la guerre sur les femmes et le besoin d’inclure les femmes dans tous les processus de résolution des conflits.
Cette résolution :
- Confirme la nécessité de protéger les femmes et les jeunes filles contre les violences ainsi que la violation de leurs droits ;
- Demande à toutes les parties ayant un conflit armé, de prendre des mesures particulières pour protéger les femmes et les petites filles contre les actes de violence sexiste (en particulier le viol et les autres formes de sévices sexuels) ainsi que contre les autres formes de violence dans les situations de conflit armé ;
- Souligne que tous les Etats ont l’obligation de mettre fin à l’impunité et à poursuivre en justice ceux qui sont accusés de génocide, de crime contre l’humanité et de crime de guerre, y compris toutes les formes de violences sexistes et autres contre les femmes et les petites filles. A cet égard, elle fait valoir qu’il est nécessaire d’exclure ces crimes du bénéfice des mesures d’amnistie.
Cependant, beaucoup de gouvernements et institutions restent les bras croisés : l’impunité continue, les viols et les tueries ne cessent d’augmenter malgré les résolutions et textes de loi adoptés et ratifiés par eux.
C’est pourquoi, unies dans un même et seul effort, avec les femmes de la République Démocratique du Congo, dans la lutte pour un processus de résolution de conflits et de rétablissement d’une paix durable, les femmes venues de tous les coins du monde ont réclamé à l’état Congolais, garant de la paix et de la sécurité de ses populations :
- Le rétablissement de la justice, des forces de l’ordre et des services de sécurité par le paiement d’un salaire suffisant et par la remise à niveau de l’appareil judiciaire (formation du personnel, mise à disposition de l’infrastructure nécessaire et lutte contre la corruption) ;
- De mettre fin à l’impunité : mise en application effective des lois, particulièrement celle contre les violences sexuelles (loi n°06-019 du 20 juillet 2006). Formation des « para juristes » (pour le conseil et l’orientation) et vulgarisation des lois portant sur les violences sexuelles ;
- De prévenir et de donner des réponses intégrées (multidisciplinaires) aux violences faites aux femmes et à leurs conséquences par la prise en charge globale des femmes victimes de violences (en veillant à l’effectivité et à la concrétisation de cette aide sur le terrain pour que les victimes en bénéficient réellement), création de centres d’hébergement et d’accueil (travaillant selon une optique pluridisciplinaire, avec un objectif d’autonomisation des femmes victimes de violences) ;
- De veiller à une approche multisectorielle dans la lutte contre la violence, en collaboration avec une justice non sexiste et non corruptible ;
- D’accorder une attention toute particulière aux filles et aux groupes les plus vulnérables, dont les enfants des rues, les enfants soldats et ex-soldats, les victimes de la traite des êtres humains…
- De soutenir les forces et les structures qui luttent contre toutes formes d’impunité sur le territoire et d’encourager la population à dénoncer les exactions subies. Mettre en place des structures autonomes permettant de prendre en charge cette population traumatisée ;
- D’instaurer des projets de rétablissement d’une justice indépendante, libre, transparente et accessible à tous.
Que tous les responsables politiques et militaires des pays des grands lacs (impliqués de près ou de loin dans ce conflit) ainsi que la communauté internationale, entendent cet appel, afin de briser le silence sur les atrocités qui se déroulent actuellement dans la sous région. Qu’ils participent effectivement, aux côtés de la République Démocratique du Congo, au rétablissement de la paix et la sécurité dans cette partie de son territoire en particulier et aussi sur toute son étendue.
Que toutes les femmes revenant de Bukavu, qui ont vu de leurs yeux et entendu les témoins, partout où elles se trouvent, soient les ambassadrices de femmes congolaises et de toutes celles des territoires frappés par les violences de la guerre, par la pauvreté… Qu’elles continuent leur marche afin que l’espoir, qu’elles ont suscité lors de leur passage dans cette ville du Congo, porte ses fruits et que l’on dise un jour (qui sait ?), que grâce à elles, le Congo a retrouvé la paix et les femmes, le sourire.
La force des femmes n’est-elle-pas une chance pour la paix ?
Sylvie Mbombo, Vice-Présidente